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Benkirane, 8 mois après Un gouvernement à deux vitesses

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Celle des ministres du PJD et celle des autres
Pas la moindre mesure concrète à annoncer au patronat
Majorité: Benkirane agit comme s’il était seul maître à bord

Les doléances des patrons de la majorité pour discuter les dossiers au Conseil de gouvernement avant de les rendre publics sont restées des vœux pieux. Abdelilah Benkirane ne consulte pas ses alliés
Après près de 8 mois à la tête du gouvernement, Abdelilah Benkirane ne semble pas encore avoir pris ses marques. Même avec ses sorties, le Chef du gouvernement n’est pas arrivé à imprimer un rythme soutenu à son exécutif qui roule à deux vitesses. La première incarnée par les ministres appartenant aux trois formations alliées que sont l’Istiqlal, le MP et le PPS. A l’exception de celui de la Santé, les autres membres du gouvernement travaillent dans la sérénité, sans faire de vagues. La deuxième vitesse est prise par les ministres du PJD qui agissent souvent comme s’ils étaient encore dans l’opposition. Plusieurs d’entre eux ont commencé par dénoncer, publiquement, la gestion de leurs prédécesseurs. On a encore en mémoire la cacophonie du gouvernement, avec la sortie du ministre de la Justice sur Marrakech, rappelé à l’ordre par son collègue au Tourisme. Celle du ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement sur les jeux du hasard, recadré par celui de la Jeunesse et des Sports.
Les couacs se sont multipliés au point de donner une image d’un gouvernement sans cohérence ni coordination, dont la mission incombe à Benkirane. De ce point de vue, il a failli à son rôle de chef d’orchestre.  Quoique ces dernières semaines, les sorties de route de ses ministres ont quelque peu diminué, après que le Chef du gouvernement ait multiplié les mises en garde.
Sur le volet de la communication, Benkirane tient toujours la tête d’affiche. Seul bémol: des démentis via la MAP quand cela chauffe. Mais une présence qui tranche avec l’absence quasi maladive de son prédécesseur de la scène politique. Au Parlement, sa première prestation, conformément à l’article 100 de la nouvelle Constitution, avait attiré les députés, les observateurs et 2 millions de téléspectateurs. Un exploit. Par la suite, cela s’est banalisé. Mais son style décontracté, qui allie l’humour et une manière populaire de parler, est resté intact. Sa façon théâtrale de se produire en public séduit même des hauts fonctionnaires qui lui sont hostiles. Ceux qui assistent à des réunions animées par Benkirane avouent ne pas s’ennuyer. «C’est vivant», dit l’un d’entre eux. Cependant, le revers de la médaille risque de déplaire. Benkirane semble privilégier l’oral. Les observateurs ont été frappés de constater que le chef du gouvernement est venu, dans deux grandes réunions avec les opérateurs économiques, sans la moindre mesure concrète à annoncer. La première fois avec le patronat marocain, la seconde avec un parterre de plus de 220 hommes d’affaires français.

    Les couacs se sont
    multipliés au point
    de donner une image
    d’un gouvernement sans
    cohérence ni coordination,

    dont la mission incombe à Benkirane

En outre, dans la gestion des affaires publiques, le Chef du gouvernement ne s’est pas distingué outre mesure. Le seul fait d’arme concret dont il peut s’enorgueillir reste la hausse du prix des carburants, mesure jugée impopulaire par une large partie de la population. Sur ce dossier, le PJD avait vite repris le dessus. En moins de deux jours, il est arrivé à détourner l’attention de l’opinion publique  vers un autre débat: les primes des finances et l’accusation portée contre Salaheddine Mezouar. Les discussions autour de ce thème semblent plus passionnantes auprès de la population. Mais la tournure prise a embarrassé le gouvernement et a impacté négativement la cohérence de la majorité dont certains dirigeants se sont demandés si leur allié, le PJD, n’était  pas en train d’exécuter un jeu de rôles. Les uns protestent pour garder une prise sur la population tentée de leur tourner le dos après les mesures impopulaires. Les autres interviennent en pompiers pour éteindre le feu. Cela vient du fait que le PJD est hanté par l’expérience de l’USFP au gouvernement. Il ne veut surtout pas revivre la dégringolade du parti, hier encore en tête et populaire, mais le voilà arrivé 5e après une dizaine d’années d’exercice de pouvoir.
En tout cas, ce dossier vient confirmer que le Chef du gouvernement agit comme s’il était seul maître à bord. En effet, sur la hausse du prix des carburants, la publication de la liste des agréments de transport ou les cahiers de charges de l’audiovisuel public, Abdelilah Benkirane ne consulte pas ses alliés de la majorité. Pourtant, il avait signé une Charte politique à la veille de la formation de son gouvernement. Il limite la concertation aux seuls ministres du PJD. D’ailleurs, les doléances des patrons des partis, qui composent la majorité, pour discuter des dossiers au Conseil de gouvernement avant de les rendre publics, sont restées des vœux pieux. Cela risque de s’empirer.

Mohamed CHAOUI

 

El Mustapha Ramid: Y arrivera-t-il?

Il a hérité du chantier de la réforme de la Justice. Celle-ci a connu une nouvelle relance avec la mise en place par le Roi de la haute instance pour la réforme de la Justice. Cette instance qui mène un débat national autour de cette question permettra de recadrer la plateforme de réforme préparée par le ministre pjdiste. Connu pour avoir défendu la cause des détenus salafistes via l’association Al Karama, Ramid a joué un grand rôle dans la libération des cheikhs Kettani, Abou Hafs et Haddouchi, qui ont bénéficié de la grâce royale, sur proposition du ministre.
Aujourd’hui, Ramid est attendu sur d’autres dossiers chauds, notamment ceux liés au principal credo de son parti: la lutte contre la prévarication et l’indépendance de la Justice. Surtout qu’avec la multiplication des arrestations d’anciens dirigeants de certains établissements publics, les détracteurs du gouvernement pointent une sélectivité dans le traitement de ces dossiers.
Autre chantier de taille pour Ramid: normaliser les relations avec les professionnels de la Justice, notamment les magistrats, dont le rôle est déterminant dans la mise en œuvre de la réforme du secteur.

Mohand Laensar: Le défi des élections

Homme d’Etat d’une grande expérience dans la gestion publique, Mohand Laensar s’est vu attribuer un département de souveraineté, qui a échappé pendant plusieurs années au giron des politiques. Dès le début, le ministre de l’Intérieur a voulu jouer la carte de la transparence. Le département qu’il dirige étant directement impliqué dans la gestion des élections, il a préféré passer la main à Essaïd Ameskan, pour diriger le parti du Mouvement populaire. Cela a permis d’éviter toute équivoque et tout risque de conflit d’intérêts. Surtout que le pays s’apprête à lancer la suite du calendrier électoral.
A commencer par les communales dont la date d’organisation a suscité une polémique au sein de l’échiquier politique. Lors d’une séance des questions orales à la Chambre des représentants, Laensar a promis «d’ouvrir le dialogue avec tous les acteurs politiques sur l’ensemble des détails concernant l’organisation des prochaines élections, y compris le découpage et les procédures techniques y afférentes».
Le ministre de l’Intérieur a également jeté un pavé dans la marre de la polémique autour des primes des Finances, en publiant un communiqué réclamant au ministre de la Justice l’ouverture d’une enquête concernant les déclarations de Abdelaziz Aftati, au sujet des «services» qui seraient mis à la disposition de l’ancien ministre des Finances. Laensar est également attendu sur la préparation du projet de loi organique sur la régionalisation avancée.

Akhannouch: Des tops et des flops

Autant le plan Maroc Vert a réellement accroché au point d’entamer sa vitesse de croisière, autant la stratégie de développement du secteur de la pêche peine à décoller.
Dans le premier cas, des filières d’importance primordiale (lait, viandes, agrumes et primeurs) ont atteint, voire dépasser les objectifs fixés à mi-parcours par la stratégie agricole. L’écoulement de produits agricoles frais et transformés a été aussi sécurisé sur les  marchés de l’UE via l’amélioration des conditions d’accès. En revanche, le plan Halieutis peine à lancer les axes de la réforme. Mis à part l’aménagement des pêcheries, tous les projets structurants sont en panne. C’est que le secteur demeure dans sa globalité plombé par une crise de leadership professionnel.

Najib Boulif: Le boulet de la compensation

Ministre chargé des Affaires générales et de la Gouvernance, Najib Boulif a hérité du dossier compliqué de la réforme de la Caisse de compensation. Depuis sa nomination, il a multiplié les rencontres avec les professionnels, mais aussi avec les associations des consommateurs pour décliner sa vision de la réforme. Depuis, rien n’a filtré sur l’évolution de ce dossier jusqu’à l’annonce de la hausse des prix des carburants.
Une décision qui a créé une fronde contre le gouvernement Benkirane. Ses détracteurs ont pointé les hausses induites au niveau des prix des produits de consommation de base. Pendant des semaines, Boulif s’est acharné à défendre cette décision. Le ministre est également en charge du dossier de l’amélioration de l’environnement des affaires.
A l’issue de la première réunion, organisée en présence du Chef du gouvernement, la présidente de la CGEM, Miriam Bensalah, était plutôt satisfaite des intentions du gouvernement sur ce dossier. Aujourd’hui, si certains pas ont été franchis, notamment en ce qui concerne les délais de paiement, les attentes sont encore grandes, surtout sur des questions comme le foncier.

Aziz Rebbah: Les agréments de la discorde

Aziz Rebbah a été nommé à la tête d’un secteur qui connaît un taux élevé de corruption, de l’avis même de l’Instance centrale de prévention contre la corruption, qui a réalisé une étude commandée par le département de l’Equipement. Il s’agit donc d’un véritable test pour ce ministre Pjidiste, dont le parti faisait de la lutte contre la corruption un slogan très vendeur. Rebbah a également hérité du chantier lourd de lutte contre l’économie de rente, autre sujet également très exploité au niveau électoral. Sur ce point, Rebbah n’a pas fait dans la dentelle. Il avait alimenté la polémique durant des semaines en publiant la liste des bénéficiaires des agréments de transport. Il a été sévèrement critiqué par l’opposition et certaines ONG, qui avaient réclamé la publication des listes des bénéficiaires des carrières et de la pêche hauturière. Elles ont exigé surtout de mettre en place une véritable réforme.
Aujourd’hui, la pression de l’opposition a bloqué les autres listes. Toutefois, il a exposé devant le Parlement les grandes lignes de son projet de réforme, basé sur l’instauration des appels d’offres, via des cahiers des charges, et avec des normes bien définies. Un projet de loi consacrant cette orientation devra être prêt lors de la prochaine rentrée parlementaire.

Baraka/Azami: Les siamois des Finances

La nouvelle architecture du gouvernement a imposé à Nizar Baraka, ministre de l’Economie et des Finances, et à Idriss Azami, en charge du Budget, de travailler en tandem. Jusqu’à aujourd’hui, peu de fausses notes ont été relevées dans la coordination entre les deux ministres. Ils ont réussi leur premier challenge de faire passer la loi de Finances 2012, après l’actualisation des hypothèses inscrites dans le projet mis en place par Salaheddine Mezouar, ex-ministre des Finances. Ils ont également relancé le projet de réforme de la loi organique des Finances, qui doit être harmonisée avec les dispositions de la nouvelle Constitution. Néanmoins, c’est lors des deux dernières semaines que Baraka et Azami ont dû faire preuve de solidarité et de courage politique. L’annonce de la situation difficile que traverse l’économie nationale et les mesures prises pour y faire face ont suscité beaucoup de critiques. Ces mesures, il est vrai, n’ont pas fait l’unanimité. L’opposition y a trouvé une bonne occasion pour attaquer le Chef du gouvernement qui, selon elle, n’a pas tenu ses promesses d’éviter au Maroc de s’endetter à l’international. Si les partis de l’opposition laissent croire que le risque du retour du PAS est là, Baraka et Azami assurent que la situation est sous contrôle, et que les mesures prises permettront d’assurer la relance, notamment en donnant un coup de fouet aux stratégies sectorielles.

Nabil Benabdallah, l’homme de la ville

Nabil Benabdallah s’est concentré sur la politique de la ville, un concept nouveau, qu’il a voulu vulgariser et le partager avec tous les acteurs de la société. Ainsi, après de multiples réunions dans les régions, avec les ministères et au Parlement, Nabil Benabdallah a fini par organiser les Assises de la politique de la ville en juin dernier. A l’issue de cette rencontre, plusieurs recommandations ont été faites. Ainsi, la politique de la ville doit pousser les différents départements ministériels à coordonner leurs actions dans la même direction. Dans cette affaire, l’important est d’y aller progressivement, avec des exemples et des villes qui sont déjà prêtes à passer le cap. L’action de Benabdallah ne s’est pas limitée à la politique de la ville. Le ministre de l’Habitat a mis sur orbite le logement pour la classe moyenne. Cela se fera dans le cadre de conventions signées avec les opérateurs privés et publics. Idem pour la construction des logements destinés à la promotion de l’habitat locatif, via des mesures fiscales attractives. Une sorte de logements en location, avec option d’achat.

Education nationale: Tensions extrêmes

Grèves en série, échec du plan d’urgence, retard dans les infrastructures… le moins que l’on puisse dire, c’est que le mandat de Mohamed El Ouafa ne semble pas se dérouler sous de bons auspices. Le ministère de l’Education nationale accumule en effet les griefs de la part des professionnels. On lui reproche notamment l’échec du plan d’urgence qui arrive en fin de parcours cette année, alors qu’il n’est en charge de l’Education nationale que depuis janvier dernier.  Lors d’une récente réunion de la Commission de l’enseignement, de la culture et de la communication à la Chambre des représentants, El Ouafa a reconnu que son ministère n’a pas pu réaliser tous les objectifs du programme d’urgence 2009-2012, expliquant que celui-ci comporte des axes et objectifs divers, ce qui a provoqué une certaine dispersion faisant que «le bilan de ce programme soit relativement et partiellement positif». Le ministre a pointé du doigt des «faiblesses que comporte le programme d’urgence, dont le manque de communication au sein du système éducatif».

Saâdeddine El Otmani: Le VRP du Maroc

Depuis sa nomination à la tête du ministère des Affaires étrangères, Saâdeddine El Otmani a sillonné plusieurs pays. Objectif, donner un nouveau souffle à la diplomatie marocaine et assurer de nouveaux relais grâce au réseau tissé par le PJD avec des partis islamistes à travers le monde. La nouvelle orientation de la diplomatie marocaine sous ce ministre politique a réservé une place de choix au voisinage immédiat. Ainsi, El Otmani a visité les différents pays du Maghreb pour promouvoir la relance de l’UMA. En tête, l’Algérie qui figure parmi les priorités de la stratégie diplomatique du nouveau gouvernement. El Otmani et Benkirane n’ont cessé de le répéter depuis leur arrivée au pouvoir. Néanmoins, Alger continue de faire la sourde oreille à leurs appels d’ouverture des frontières. Au niveau international, Otmani a réussi à préserver les liens avec les principaux partenaires du Maroc, notamment la France, les Etats-Unis, l’Espagne… Les changements de gouvernements n’ont pas eu d’effet sur les relations avec ces pays. Toutefois, El Otmani n’a pas réussi à avoir un soutien explicite des grandes puissances après la décision du Maroc de retirer sa confiance à l’envoyé du secrétaire général des Nations Unies au Sahara, Christopher Ross. Ce qui s’est traduit par une situation de blocage qui dure encore.

Lahcen Daoudi: Le tollé de la gratuité

C’est le ministre du gouvernement Benkirane qui s’est le plus illustré par ses déclarations fracassantes. Lahcen Daoudi, en charge de l’Enseignement supérieur, a d’abord fait parler de lui sur des dossiers liés à la mauvaise gestion au sein de son département. C’est une véritable opération mains propres qui a été initiée au sein de ce ministère. Des dossiers devaient être transférés à la justice, selon les déclarations de Daoudi. Au niveau du produit éducatif, le ministre a adopté une nouvelle philosophie, basée sur des partenariats au niveau international, pour permettre l’installation au Maroc d’universités de grand calibre.
L’idée est de renforcer l’offre éducative au Maroc, sans pour autant étouffer le budget de l’Etat. Toutefois, Daoudi a été dans l’œil du cyclone après sa déclaration sur la fin de la gratuité dans l’enseignement supérieur. Le Chef du gouvernement a dû intervenir et démentir cette information, et exhorter son ministre à présenter des explications. Pour Daoudi, il n’a jamais été question d’annulation de la gratuité, et qu’il s’agit uniquement d’une contribution pour les étudiants issus de familles aisées, qui souhaitent intégrer certains établissements comme la faculté de médecine. Ceci n’a pas empêché l’opposition de maintenir ses critiques.

Mustapha El Khalfi: Piégé par les cahiers des charges

Le plus jeune ministre du gouvernement figure également parmi les plus dynamiques de l’équipe de Benkirane. Dès sa nomination, Mustapha El Khalfi a multiplié les rencontres avec les professionnels et les visites aux locaux des établissements dont il assure la tutelle. Au niveau de la presse écrite, il a remis sur les rails le processus de réforme du code de la presse. Celui-ci ne devra plus comporter de peines privatives de liberté. Une commission de sage, présidée par l’ancien ministre de la Communication, Larbi Messari, a été mise en place pour recueillir les propositions des professionnels. Toutefois, l’adoption des nouveaux cahiers des charges du pôle audiovisuel a constitué un véritable challenge pour El Khalfi. En effet, le contenu de ces documents n’a pas fait l’unanimité, certains allant même jusqu’à accuser le ministre de vouloir islamiser les chaînes publiques. Une polémique a enflé pendant plusieurs semaines. Il a fallu un arbitrage royal pour remettre les choses en ordre. Une commission présidée par Nabil Benabdallah, ministre de l’Habitat, et ancien ministre de la Communication, a été mise en place pour modifier certaines dispositions de ces cahiers des charges. Cette commission a finalisé son travail, et la nouvelle version des cahiers des charges devait être présentée jeudi au Conseil de gouvernement.

El Haussaine Louardi: Où est le dossier des cliniques privées?

C’est le feuilleton des marchés des médicaments, en particulier ceux des vaccins, soupçonnés, annulés, reportés, controversés… qui aura le plus marqué les premiers mois du ministre de la Santé, El Haussaine Louardi. Autre dossier à scandale: celui des prothèses PIP retirées du marché local. Des ratés, Louardi en a enregistré aussi. A ce jour, il n’a pas encore mené les réformes à hauts risques comme celle des hôpitaux. Il a également passé sous silence le dossier des cliniques privées dont il a arrêté les inspections. Des dossiers qui portent préjudice à des professionnels, avec pour toile de fond des règlements de compte politiques sur le mandat de l’ancienne équipe. En effet, après avoir pris connaissance des conclusions d’audits internes et de certains marchés jugés compromettants, Louardi n’a pas tardé à mettre en veilleuse plusieurs responsables. S’ajoute à la liste la crise des médecins et des pharmaciens d’officines qui se plaignent toujours de leur situation déplorable, de la concurrence déloyale et des circuits parallèles… Ce qui a conduit à une succession de grèves qui ont paralysé le secteur. Hormis ces dossiers complexes, le premier bilan compte aussi de nombreuses réalisations. C’est sous son mandat que le Ramed a été lancé. Louardi a également lancé le débat national en vue de l’élaboration d’une Charte de la santé.

Abdeltif Loudyi: Protection contre immunité

Le ministre en charge de l’Administration de la défense nationale, Abdeltif Loudyi, est de nature discret, un caractère qui sied  à la fonction qu’il occupe depuis bientôt trois ans. Mais il vient d’être mis sous les projecteurs, via le Parlement. Ainsi, la Commission des affaires étrangères, de la défense et des MRE de la Chambre des représentants a adopté, à l’unanimité, le projet de loi relatif aux garanties accordées aux militaires des FAR. La semaine suivante, le texte a été approuvé en séance plénière. C’est son premier projet de loi qu’il fait passer en tant que ministre.
Mais avant de passer ce cap, le texte avait suscité une vive polémique lors des discussions au niveau de cette Commission.  Dans sa première version, l’article 7 accordait l’immunité pénale aux militaires lors d’opérations menées, sur ordre de leurs supérieurs hiérarchiques, sur le territoire national. Il a été amendé. Ainsi, l’idée que les militaires ne pouvaient pas être poursuivis pénalement a été remplacée par «les militaires des FAR bénéficient de la protection de l’Etat». L’avis du Conseil national des droits de l’homme a été prépondérant.

Bassima Hakkaoui: Amina est passée par là

Unique femme au gouvernement de Benkirane, tous les projecteurs sont braqués sur Bassima Hakkaoui, ministre de la Famille, de la Femme, de la Solidarité et du Développement social. Surtout qu’elle est en charge d’un secteur où les attentes des citoyens et des associations sont énormes. Sauf que jusque-là, elle n’a pas encore satisfait les revendications des ONG féministes. Elle a été particulièrement critiquée sur sa position concernant l’affaire Amina Filali. Car, la ministre islamiste n’avait pas soutenu les associations qui réclamaient l’annulation des dispositions du code pénal permettant au violeur d’échapper à la prison, s’il épouse sa victime.
Par ailleurs, la ministre a également brillé par son absence lors de certains événements où elle était directement concernée. Ainsi, Hakkaoui avait boudé les travaux du Forum national sur l’avortement clandestin, ou encore ceux des Assises de la parité. Par ailleurs, suivant l’exemple de ses collègues Rebbah et Choubani, elle a également voulu jouer la carte de la transparence en publiant la liste des associations ayant bénéficié de subventions de son département. Aujourd’hui, la ministre de la Solidarité est attendue sur plusieurs chantiers, notamment ceux concernant les personnes en situation de handicap, les enfants de la rue…

Abdeladim El Guerrouj: L’impasse du dialogue social

Abdeladim El Guerrouj, ministre de la Fonction publique et de la Modernisation de l’Administration, a hérité d’un département à la charnière du fonctionnement du gouvernement. Dès sa nomination, il s’est retrouvé face à des challenges de taille. A commencer par la nécessité de rétablir la paix sociale au niveau des différentes administrations publiques, qui ont vécu ces dernières années sur les rythmes des grèves.
El Guerrouj a opté pour l’anticipation dans le traitement de ce dossier, en allant à la rencontre des patrons des centrales syndicales pour recueillir leurs propositions et leurs doléances. Il avait également rappelé l’engagement du gouvernement à mettre en œuvre l’accord d’avril 2011. Mais cela ne lui a pas épargné une montée au créneau de deux centrales syndicales, la CDT et la FDT, qui avaient organisé «la marche de la dignité», pour dénoncer «les défaillances dans la réponse aux revendications des fonctionnaires et des salariés». Ces deux centrales se sont également retirées du dialogue social dont le volet relatif au secteur public est piloté par El Guerrouj. Mais c’est sur un autre terrain que le ministre s’est particulièrement illustré. C’est lui qui a présenté le projet de loi organique relatif aux nominations à la tête des établissements publics, qui a renforcé les attributions du Chef du gouvernement en vertu de la nouvelle Constitution, adopté récemment au Parlement.

Emploi: Pas assez vite!

Moult études et peu de réalisations. Le bilan  d’Abdelouahed Souhail, après  huit mois à la tête du département de l’emploi est assez terne. Pourtant, les chantiers et les attentes sont énormes. Et l’on veut des mesures rapides.
Le ministre est notamment attendu sur des dossiers lourds et non des moindres: l’indemnité pour perte d’emploi, la lutte contre l’évasion sociale, l’intermédiation… De même, l’une des urgences pour Souhail est la loi sur la grève qui devrait voir le jour rapidement, selon lui. Et pour dégager les tendances lourdes du marché, le ministre a annoncé en juillet dernier l’instauration d’un Observatoire de l’emploi. De même, la CGEM avait lancé l’idée d’un pacte national pour l’emploi. Un chantier qui porte sur 20 mesures à même de redynamiser l’emploi des jeunes. Deux conventions ont d’ailleurs été signées avec le gouvernement.
Souhail estime par ailleurs que le Maroc est appelé à créer entre 2,5 millions et 3,5 millions de postes d’emploi sur les 10 prochaines années pour répondre aux besoins pressants des jeunes. Pour mieux préparer ces jeunes à l’intégration du marché de l’emploi, une étude d’élaboration de la stratégie intégrée de développement de la formation professionnelle à l’horizon 2020 a été lancée. Son approche est structurée autour de cinq grandes phases, dont les phases de diagnostic et de benchmark ont été traitées jusqu’à présent. Les autres phases concernant l’élaboration de la stratégie et la présentation d’un plan de formation et des contrats-programmes seront réalisées ultérieurement.

Habib Choubani: Les ONG passées au scalpel

Quelques semaines seulement après sa prise de fonction, Habib Choubani, ministre chargé des Relations avec le Parlement et la Société civile, a manifesté sa volonté à mettre de l’ordre dans les rangs des associations. Transparence et bonne gouvernance semblent être les mots d’ordre. Suivant les pas de son collègue Aziz Rebbah, qui a publié la liste des bénéficiaires des agréments de transport, Choubani a mis en ligne celle des associations bénéficiant d’un financement étranger. Celles-ci sont désormais obligées de déclarer les subventions reçues, sous peine de sanctions. Le ministre est également attendu sur un autre volet de la réforme du champ associatif. Les ONG réclament la mise en place de la loi fixant les modalités de leur participation à la législation, comme cela est prévu par la Constitution. Le ministre a fixé un délai pour recevoir leurs propositions avant de lancer un débat national. Dans l’autre volet de ses attributions, Choubani a réussi à conduire, sans grands heurts, la relation entre l’exécutif et le législatif. Seule fausse note, la déroute qu’a connue la séance mensuelle du Chef du gouvernement à la Chambre des conseillers, en dépit d’une réunion préparatoire avec les chefs de groupes, pilotée la veille par Choubani.

 

M. A. M. avec F. Z. T. & A. E.
source/L’economiste

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